Que font les humanités numériques aux sciences dites humaines ?

par Philippe HUNEMAN

Avril-Juin 2024 - tome 112/2

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Philippe Huneman

Que font les humanités numériques aux sciences dites humaines ?

Les humanités sont affectées massivement par les nouveaux outils numériques, recueil de données comme traitement algorithmique de ces données. Au-delà des facilités de stockage de textes et de navigation dans des corpus, dans quelle mesure le tournant digital transforme-t-il les humanités ? Dans cet article je m’appuierai sur le constat précédemment dressé dans Les sociétés du profilage (Huneman, 2023) du glissement d’une épistémologie plutôt causale vers une épistémologie purement statisticaliste et prédictive lorsque les données massives opèrent, pour interroger la nature et la nouveauté des humanités dites digitales. À partir d’une description du « data mining » en histoire des sciences je généraliserai la description des humanités numériques comme modélisation décentrante en troisième personne. Dans un dernier temps j’analyserai leur place dans le système des humanités, en insistant sur l’exigence d’une positon critique spécifique impliquant la dimension herméneutique des humanités, pour que le tournant numérique exprime sa puissance de nouveauté plutôt qu’un redoublement stérile ou un remplacement fort biaisé des savoirs existants.

What impact do digital humanities have on the so-called human sciences?

Human sciences are massively affected by new digital tools, both in terms of data collection and algorithmic processing. Beyond the ease with which texts can be stored and corpora navigated, to what extent is the digital turn transforming the humanities? In this article, I will draw on the observation previously made in Les sociétés du profilage (Huneman, 2023)  concerning the shift from a more causal epistemology to a purely statisticalist and predictive epistemology when massive data is at work, in order to question the nature and novelty of the so-called digital humanities. Starting from a description of data mining in the history of science, I will generalize the description of digital humanities as a decentralized third-person modeling. Finally, I will analyze their place in the world of human sciences, insisting on the need for a specific critical stance involving the hermeneutic dimension of the humanities, so that the digital turn expresses its power of novelty rather than being a sterile duplication or a highly biased replacement of existing knowledge.

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