Le messianisme chrétien : une manière de s’introduire dans le processus de mondialisation

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janvier-mars 1998 - tome 86/1

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La notion catholique d’universalité hésite entre une conception spatiale, très ancienne, et une visée symbolique, confirmée par Vatican II, mais volontiers réinterprétée de nos jours en termes juridiques. Une lecture globale des Écritures, inspirée de l’Épître aux Éphésiens, a produit, après un modèle « intégraliste » de catholicité de la foi, une lecture eschatologique de la « récapitulation » de toute l’humanité dans l’Église corps du Christ, qui offre un échange réciproque entre toutes les cultures du monde et la vérité évangélique. Propre à favoriser l’entrée du christianisme dans le processus de mondialisation, cette vision n’échappe pourtant pas au soupçon de dissimuler une violence dominatrice. Pour y parer, l’Église doit revenir au messianisme évangélique et le prendre pour forme d’un universel concret affranchi de tout exclusivisme, car, dans le Christ, Dieu communique sa sainteté à la multitude humaine et chacun est engendré unique en lien avec les autres à la façon dont le Christ est unique. Cet universalisme messianique est avant tout d’ordre pratique et créatif : c’est un style de vie qui repousse la violence des normes institutionnelles en situant les chrétiens aux frontières du lien qui tient ensemble les individus et les sociétés, par-delà toute idolâtrie et tout désenchantement.

Christian messianism : a way of being introduced into the process of globalization

The Roman Catholic idea of universality hesitates between a spatial conception, very ancient, and a symbolical perspective, confirmed by Vatican II, but freely reinterpretated today in juridical terms. A global reading of the Scriptures, inspired by the Epistle to the Ephesians, has produced, after an “ integral” model of the catholicity of faith, an eschatological reading of the « recapitulation » of all humanity into the Church-body of Christ, which offers a reciprocal change between all cultures of the world and evangelical truth. This vision, proper for favoring the entrance of Christianity into the process of globalization, does not escape, however, a suspicion that it dissimulates a dominating violence. To ward this off, the Church should return to evangelical messianism and take it in the form of a concrete universal, free from all exclusivity, for in Christ, God communicates his holiness to the human multitude. Each one is engendered uniquely, in connection with others in the way that Christ is unique. This messianic universalism is, above all, of a practical and creative order It is a style of life that wards off the violence of institutional norms in situating Christians at the frontier of the connection that holds together individuals and societies, beyond all idolatry and disenchantment.

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